Jean-Charles Heslot
La Villa du Commandant d’Auschwitz : Les Derniers Secrets Révélés par La Zone d’intérêt
Un “paradis” à deux pas de l’enfer, au cœur d’Oświęcim.
📍 Oświęcim, sud de la Pologne
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🏠 Une maison au confort sinistrement ordinaire
Avec leurs cinq enfants, Rudolf Höss – commandant du camp d’extermination d’Auschwitz – et sa femme Hedwig vécurent pendant quatre ans dans une élégante villa entourée d’un jardin luxuriant… à quelques mètres seulement des crématoires et des baraquements où furent exterminées plus de 1,1 million de victimes, en majorité juives.
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🎬 Une demeure au centre du film La Zone d’intérêt
La maison a récemment retrouvé une inquiétante visibilité avec le film La Zone d’intérêt (Jonathan Glazer, 2023 - Cannes ; sortie France : janvier 2024). Ne pouvant tourner dans la villa originale, une réplique fut utilisée, située à proximité du camp.
Le jardin, recréé à l’écran dans une version plus vaste et esthétiquement enjolivée, accentue le contraste glaçant entre la vie domestique paisible des Höss et l’horreur industrielle du génocide.
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🚷 Une visite exceptionnelle… mais partielle
La villa n’est pas ouverte au public. Toutefois, à l’occasion d’une visite encadrée par l’historienne Teresa Wontor-Cichy, quelques journalistes ont pu pénétrer dans le jardin.
Interdiction formelle de prendre des photos. À l’intérieur, une autre famille y vit aujourd’hui.
Parmi les vestiges visibles :
• Le cottage où Heinrich Himmler fut reçu
• Des dalles de terrasse d’origine
• L’emplacement de la piscine des enfants Höss
• Les restes de la serre d’Hedwig, où elle cultivait tomates et fleurs qu’elle envoyait aux dignitaires nazis
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🧵 Des détenues réduites au rang de domestiques
Pour entretenir ce “havre de paix”, Hedwig Höss employait des détenues, dont :
• Deux femmes juives affectées à la couture
• Sophie Stippel, une Témoins de Jéhovah chargée de la cuisine, qui profita de sa position pour aider d’autres prisonniers
Elle préparait les Karthäuser Klöße (pain perdu) que la famille affectionnait.
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🕊️ Les enfants Höss sortent du silence
Pendant près de 80 ans, les enfants du commandant se sont murés dans le silence. Mais les langues se délient :
• Brigitte Höss, décédée en 2023, confie à The Guardian :
« Je suis sûre que ma mère savait. Elle était très triste. Mais elle ne pouvait rien faire. »
• Hans Jürgen Höss, son frère, a accepté de retourner à la villa et témoigner dans le documentaire L’Ombre du commandant (The Commandant’s Shadow, sortie en France : 6 novembre 2024).
Il y rencontre pour la première fois Anita Lasker-Wallfisch, survivante d’Auschwitz, contrainte de jouer du violoncelle dans l’orchestre du camp.
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⚖️ Une mémoire qui s’ouvre à la vérité
Rudolf Höss, capturé après la guerre, a été jugé et pendu en 1947 sur les lieux mêmes de ses crimes.
Il affirma que sa femme « ne savait rien », mais les témoignages de ses enfants suggèrent un lourd déni familial.
Ce sont désormais leurs voix qui permettent d’affronter l’héritage du mal, à l’approche du 80e anniversaire de la libération d’Auschwitz (janvier 2025).
03/05/2025